Claudia Triozzi, La Prime
© Olivier Charlot

Haco & Claudia Triozzi




Jeudi 15/10 (horaire à confirmer)
Haco & Claudia Triozzi en collaboration avec Marc Maier, enseignant à l'université Paris Diderot - Paris 7
performance


Note d’intention
Juillet 2009


Des écarts aux détails



« L’improvisation et l’expérimentation sonores et vocales sont les matériaux de mes récents travaux. Ces pratiques contournent la virtuosité et la maîtrise vocales, des contraintes d’apprentissage qui font paradoxalement défaut à la liberté que nous espérons acquérir.
La voix est un matériau à part entière, un volume que l’on peut travailler, transformer. Je recherche une voix qui n’est pas sur la note, c’est-à-dire qui prend forme dans le sens d’un dérapage, d’un écart. Comment créer des sons et développer une conscience des sons ? Comment être à l’écoute et susciter des expériences d’écoute ?


Ce qui pourrait relier mes créations, c’est le souhait de rendre les aspects de la difficulté – la difficulté de proposer, de commencer ou d’arrêter quelque chose par exemple - et d’en faire précisément une matière à voir.
Dans ma pratique vocale, sur scène, j’oscille entre des extrêmes, des polarités, entre surexposition et opacité. Le fait d’expérimenter diverses qualités de voix – lyriques, parlées, théâtrales, de l’ordre de la poésie phonétique ou de l’expérience bruitiste –, modulées sur des hauteurs et des timbres différents, me permet d’atteindre des formes d’expressivités changeantes, d’incarner des états et de les rendre présents sur scène.
Ce travail performatif sur la voix me permet ainsi d’être dans un rapport de non-représentation. Il me conduit à des postures extrêmes, à contrario de toute position adéquate pour la voix : je me tords sur moi-même, je grimace, je tremble. J’oublie donc mon image, mes repères, pour me concentrer sur mes sensations physiques, sur des rythmes.


Je m’inscris ainsi entièrement dans une dramaturgie du ‘’personnage qui chante’’, mais toujours hors de cette notion de représentation. C’est un personnage en acte, qui agit et qui est agi, par la voix.


Une composition musicale, vocale et discursive


Pour cette création dans le cadre de Playtime, ce qui m’intéresse ici c’est d’intervenir musicalement et vocalement, à l’intérieur d’un lieu - une Université -, d’un contenu organisé et centré sur le langage - un cours de littérature, de dramaturgie ou de sciences -, d’une temporalité - un cours magistral de trois heures -, où le discours, le savoir sont mis en scène pour être transmis.
Un lieu de représentation donc, où la voix fait corps avec une pensée en acte, avec un énonciateur et son énoncé. Comment rentre-t-on dans cette parole ? Comment analyser cette parole qui surgit ? Quelles distances instaure-t-on avec le discours ?
J’aimerais ainsi travailler sur les aspects fictionnels que le cours va d’emblée mettre en jeu, puisque le professeur a organisé en amont son cours, son déroulé, la manière dont il va l’exposer. C’est cette dimension performative, cette inventivité qui m’intéresse et dont je souhaite montrer et démonter la construction, en souligner les rythmes, distendre les temporalités, composer avec. »
Claudia Triozzi


Claudia Triozzi commence ses études de danse classique et contemporaine en Italie. Elle s’installe à Paris en 1985. Et parallèlement à son travail d’interprète (avec Odile Duboc, Georges Appaix, François Verret, Alain Buffard, Xavier Leroy et Xavier Boussiron), elle crée ses propres pièces dans lesquelles elle développe aussi bien la direction de la mise en scène que l’interprétation. Son travail de recherche et de réflexion se fonde sur une transmission où l’expérience du faire, du partage et l’engagement à l’autre fait preuve de pensée ouvrant des espaces de subjectivité et de remise en œuvre du temps.
Elle produit des spectacles iconoclastes dont la danse ne sort jamais indemne. Car il s’agit toujours pour Claudia Triozzi de mettre à l’épreuve les présupposés du spectacle chorégraphique. L’espace de représentation, les modes d’interprétation propres au danseur et les notions mêmes de spectacle font l’objet d’une perpétuelle remise en question. De pièce en pièce, d’espaces d’exposition en scène de théâtre, Claudia Triozzi repousse les limites du corps et les espaces de visibilité du danseur. Ses dernières créations laissent apparaître un travail de voix qui déplace les attentes du spectateur en interrogeant la place de la danse. En effet, depuis la pièce The Family Tree (2002), Claudia Triozzi explore le travail de la voix en passant par des expériences qui l’engageront à l’écriture des textes et chansons. Elle développe des sonorités au vocabulaire bruitiste et lyrique où la voix s’exprime par des paragraphes de temps qui se puisent dans le cinéma, le théâtre et la radiophonie. Elle développe une pédagogie liée à son propre travail en intervenant dans différentes écoles d’art.


Son travail se développe aussi bien sur scène qu’au travers des vidéos ou installations, exposées dans les musées ou des galeries : Museum Kunst Palast, Düsseldorf (2001), Biennale d’art Contemporain de Lyon, Connivence (2001); Studio National des arts contemporains, Le Fresnoy, Tourcoing (2002); Galerie Maisonneuve, Paris (2002). Elle présente ses spectacles sur la scène européenne ainsi qu’aux Etats-Unis et au Japon où elle a bénéficié de la bourse AFAA, Villa Kujoyama, hors les murs (2004). En 2007, elle crée la pièce Up to date présentée au Théâtre de la Commune à Aubervilliers, dans le cadre des Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine St Denis. Claudia Triozzi obtient le DNSEP (Diplôme National Supérieur d’Expression Plastique) option art, de l’Ecole Nationale des Beau- Arts de Lyon en 2006. Depuis 1988, elle participe à des interventions pédagogiques dans différentes écoles d’art. Claudia Triozzi enseigne à l’école supérieure d’Art de Rueil Malmaison depuis 2006.
Productions : La Prime (2008), Up to date (2007), Fais une halte chez Antonella (2006), Strip-tease (2006), La baronne et son tourment (2006), Opera’s Shadows (2005), Stand (2004), The Family Tree (2002), Dolled Up (2000), Bal Tango (1999), Park (1998), Gallina Dark (1996), Les Citrons (1992), La Vague (1991).


Haco est compositrice, vocaliste, artiste-sonore, membre fondateur de « After Dinner » (1981-1991) et « Hoahio ». Dans son studio de Kobe, elle réalise de nombreux enregistrements comme productrice et ingénieur du son.
Elle est régulièrement invitée pour ses improvisations et performances sonores dans des festivals d’art expérimental au Japon et dans le monde.
En 2005, son CD électroacoustique, « Stereo Bugscope 00 », a obtenu la mention honorable, dans la catégorie musique digitale, décernée par le Prix Ars Electronica (Autriche).




Thursday 15/10 (time to be confirmed)
Haco & Claudia Triozzi with Marc Maier, professor in the university Paris Diderot - Paris 7
performance


Explanatory note
July 2009



Gaps in the Details



"Vocal and sonic improvisation and experimentation are the materials of my recent work. These practices circumvent virtuosity and vocal mastery, the constraints of apprenticeship that paradoxically fail the freedom we hope to acquire. The voice is an entire material on its own, a volume which can be worked upon, transformed. I am looking for a voice that is not on the note, in other words, one that takes shape in the sense of a sideslip, of a movement away. How to create sounds and develop a consciousness of sounds? How to listen and incite listening experiences?


Possibly, what unites my creations is the desire to render the aspect of difficulty – the difficulty of suggesting, of beginning or of stopping something, for example – and precisely of making from it a material that can be seen.
In my vocal practice, on stage, I oscillate between extremes, polarities, between overexposure and opacity. The fact of experimenting with diverse vocal qualities – lyrical, spoken, theatrical, in the order of the phonetic poetics or brutist sound experiences-, modulated over different volumes and timbres, allows me to attain forms of changing expressivities, of incarnating states and making them present on stage.
This performative work on the voice thus allows me to stand in relation to non-representation. It leads me to extreme postures, the contrary of any suitable position for the voice: I contort myself over, I grimace, I tremble. I therefore forget my image, my bearings, to concentrate on my physical sensations, on rhythms.


I thus inscribe myself entirely in a dramaturgy of “the singing character”, but always outside of this notion of representation. It is a character in action, who acts and is acted upon, by the voice.


A musical, vocal and discursive composition.


For this creation as part of Playtime, what interests me is to intervene musically and vocally into the interior of the place – a University – of a contents organised and centred on language – a literature or dramaturgical or scientific course -, of a temporality – a master’s lecture of three hours-, where discourse, knowledge are staged in order to be transmitted.
A place of representation, therefore, where the voice is embodied with thought in action, with an enunciator and their enounced. How does one enter into this speech? How can this surging speech be analysed? What distances are established by discourse?
I would thus like to work on the fictional aspects, which the lesson will at once
bring into play, because the professor has beforehand organised his lesson, his narrative, the way in which he will reveal it. It is this performative dimension, this capacity for invention that interests me and the construction of which I want to stage and un-stage, by emphasising the rhythms, distorting the temporalities, composing with it."
Claudia Triozzi